L’engagement en Afrique contre les effets du changement climatique est grand et très remarquable. S’il est vrai que le réchauffement climatique affecte plus le continent africain, il a fallu attendre jusqu’en 2022 la publication d’une certaine étude scientifique pour que les politiques publiques, les acteurs de la société civile et des citoyens redoublent leur engagement contre les effets dévastateurs du changement climatique.
Le journal Nature climate publiait en effet, une étude d’experts scientifiques qui révélait que plusieurs sites du patrimoine côtier africain pourraient disparaitre sous les eaux d’ici l’an 2100 si rien n’est fait pour arrêter les avancées vertigineuses de la mer. Les chercheurs à l’origine de l’étude avaient identifié et cartographié les incapacités physiques de 284 sites du patrimoine côtier africain à résister aux futures inondations côtières ainsi que l’érosion côtière résultantes des avancés de la mer et du réchauffement climatique. Sur ces sites recensés, 71 appartiennent au patrimoine culturel et 213 sont classés comme patrimoine naturel.
L’inquiétude devient encore plus grande en Afrique occidentale lorsque Nicholas SIMPSON, climatologue et l’un des scientifiques ayant travaillé sur le projet affirme que des sites culturels les plus remarquables situés sur le littoral ouest-africain tels que l’ile de Kunta Kinteh en Gambie, et la ville culturelle d’Aného-Glidji située au Togo, sont susceptible de disparaitre sous les eaux d’ici 2050. Ces deux sites sont connus comme des références culturelles qui retracent le passé sombre de l’Afrique à travers l’esclavage et la traite négrière.
L’urgence d’action étant devenue plus que primordiale, les acteurs politiques du Togo ont entériné le projet WACA ResIP, qui est une initiative sous-régionale financée par la Banque Mondiale (BM) et le Fonds d’Environnement Mondial (FEM. WACA ResIP a vocation de soutenir les efforts de résilience des gouvernements face aux défis du changement climatique.
Ce projet pour être efficace doit prendre en compte des solutions dures, mais aussi celles qui sont souples et qui présentent des avantages écologiques et économiques.
Les solutions dures de lutte contre les inondations côtières.
Ces solutions sont pour la plupart coûteuses, complexes à réaliser mais très efficaces pour endiguer le mal sur une longue période. Il s’agit des brise-lames et des projets de la taille du MOSE vénitien.
- Les brise-lames de troisième génération
Les brise-lames les plus connus sont ceux de la citadelle de Qaitbay en Egypte, et ceux de Saint-Malo. Mais depuis que la question du réchauffement climatique et ses conséquences menacent surtout les villes côtières, des pays africains à l’instar du Sénégal sont rentrés dans l’adoption de cette solution pour lutter contre les érosions côtières.
Reconnu comme étant une solution très efficace pour lutter contre les érosions côtières, les brise-lames sont des dispositifs orientés de manière parallèle au trait de côtes en vue de contrer l’énergie de la houle et de diminuer l’agitation du plan d’eau à la cote. Les brises lames d’après leurs conceptions réduisent la hauteur et la force des vagues en déviant une partie de l’énergie. Actuellement les brises lames sont à leur troisième génération de fabrication. Ces derniers offrent des paramètres de choix divers. Ainsi, l’on peut programmer en fonction de la saison et de la pression des vagues, leur hauteur, leur largeur, leur poids et surtout leur moment d’inertie. Les brise-lames de troisième génération offrent à 100% une résistance aux vagues. Par exemple, lors du passage de la tempête tropicale Tanya à Praia Da Vitoria aux Açores, le seul dispositif de lutte contre les intempéries qui a pu résister à l’épreuve du vent et des eaux était les brise-lames de troisième génération installés sur la côte. Ceux-ci ont pu préserver l’intégrité physique des installations situées dans ses zones. Et pour véritablement contrer les avancés de la mer et sauver notre patrimoine culturel d’Aného-Glidji, nulle solution ne doit paraitre ni trop couteuse ni trop compliquée à réaliser. En adoptant les brise-lames, nous anticipons sur les intempéries qu’importe leur degré de menace.
- S’inspirer du projet MOSE
C’est une des solutions dures qui pourraient aussi véritablement résoudre le problème de manière définitive. Le projet MOSE, est l’acronyme italien de « Modulo Sperimentale Elettromeccanico ». En français on peut le traduire par « module expérimental électromécanique ». Ce dernier est un projet gigantesque initié par les autorités de la ville touristique de Venise enfin d’empêcher la ville de disparaitre littéralement sous les eaux. Le projet est un système de défense formé de trois rangées de parois mobiles escamotables qui ont pour but d’isoler la lagune de vénise des eaux de la mer adriatique pendant les phénomènes de hautes marrées. Le système étant semi-automatique, les parois mobiles se soulèvent en moins de trente minutes pour stopper les eaux de la mer d’envahir la ville. Et en cas de basse marrées, ces parois s’abaissent permettant à nouveau à la lagune et à la mer de communiquer.
Les solutions hybrides pour protéger nos côtes
- Les enrochements et les épis
Ils ne sont pas considérés comme des solutions, mais les observations sur le terrain ont permis de les valoriser en tant que ralentisseurs de l’érosion et des transis des sédiments. Les épis sont des ouvrages constitués généralement de pieux et d’enrochements. On les établit dans les lits des fleuves ou sur les plages afin d’intercepter le courant des eaux et le transport des sédiments. En mai 2023, les travaux de protection de la bande côtière Aného-Agbodrafo avaient été achevés. Ce programme de défense contre les érosions côtières est composé de 14 épis et d’un brise-lame, et de l’érection d’une digue de sable. Il pourra intervenir de manière considérable à temporiser les avancées de la mer.
- La restauration des mangroves
Les travaux de reboisement et de restauration des mangroves entrepris dans la région des lacs au Togo par des organisations de la société civile se doit d’être poursuivis et encouragés. Ces types d’actions permettent de lutter contre les érosions côtières et de préserver l’écosystème environnemental.
Les mangroves sont capables de stocker à elles-seules le CO2 huit fois plus que les forêts classiques. Elles offrent aussi des avantages en termes de coût d’entretien. En effet, elles ne demandent presque pas d’entretien en raison de leur implantation dans l’eau. Les mangroves enrichissent la faune aquatique et servent de plateforme de reproduction et d’hébergement pour de nombreux oiseaux et rongeurs. Les racines des mangroves servent de lieu de ponte pour les poissons et les crustacés.
En misant sur les mangroves, les politiques non seulement luttent contre les érosions, mais aussi développent l’économie et le tourisme dans la localité.
- L’amélioration de la gouvernance locale et le suivi des projets
Plusieurs projets réalisés dans les pays africains sont des mort-nés. La plupart d’entre eux le deviennent à cause du manque de suivi et du défaut de plans de pérennisation du projet.
Tout projet a besoin de ces deux facteurs pour survivre au temps.
Le suivi du projet est important, car il permettra de faire une évaluation des infrastructures et de prévenir d’éventuelles dégradations.
Le plan de pérennisation du projet concerne la gouvernance locale. S’il n’y a pas de directives ni d’initiatives locales pour rentabiliser les projets ou au mieux améliorer le quotidien des habitants via ledit projet, ce dernier ne pourra pas faire long feu. Il est capital et vital d’allier aux projets, par exemple la construction d’espaces aérés. Ces centres à caractère communautaires peuvent booster les activités culturelles et festives de la localité aussi bien que les activités génératrices de revenus et le tourisme.
La gestion de nos côtes est une question prioritaire qui doit intéresser tout le monde. Car en sauvant nos côtes, nous sauvons des communautés, notre culture et notre économie.
Un commentaire
Un article très riche. Je valide 👌